Alexandra-Denisa, l’enfant papillon
J’ai récemment relu une des homélies du Père Nicolae Steinhardt qui expliquait à quel point les actes de bonté et de miséricorde envers son frère en détresse étaient importants aux yeux du Seigneur. Le passage évangélique dont il s’est servi pour argumenter ses propos est le suivant : « Car j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger et vous m’avez recueilli ; nu et vous m’avez vêtu ; malade, et vous m’avez visité ; en prison et vous êtes venus à moi. » Je souhaiterai plus particulièrement m’arrêter sur le passage que j’ai choisi comme titre de cet article « J’étais malade et vous m’avez visité » ainsi que celui de Matthieu 25 : 40 « En vérité je vous le déclare, chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits, qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait ! » car il définit bien l’attitude que nous devons avoir envers notre prochain.
Il y a environ un an, notre paroisse a pu lire sur notre forum un message décrivant la souffrance de la petite Alexandra-Denisa BIBIRIG atteinte d’épidermolyse bulleuse, également appelée « la maladie du papillon ». C’est à elle que je souhaite dédier cet article. A elle, ainsi qu’à ceux qui l’ont aidée.
On trouve le Christ dans chaque être humain que nous croisons et chacune de nos bonnes actions pour un de nos frères ou une de nos sœurs est une bonne action faite pour le Christ, comme Il le dit Lui-même. Cependant, le tumulte de nos vies quotidiennes, dans un monde qui avance à la vitesse de nos pensées agitées, notre sensibilité est souvent anesthésiée et nous ne remarquons plus la souffrance d’autrui et par la même la souffrance du Christ qui l’habite. Le Christ en nous souffre car nous ne Lui laissons pas le temps d’aider un souffrant et le Christ en face souffre devant notre indifférence ou notre manque de temps, de courage, de volonté de L’aider. Il y a toutefois des personnes dont la souffrance est si évidente, que même nos sensibilités anesthésiées ne peuvent ignorer. Alexandra-Denise BIBIRIG ( http://alexandrabibirig.com/ ) est une de ces personnes. Elle est l’exemple même d’un de ces petits dont parle le Christ. Je ne donnerai pas de détails sur sa maladie et sur les stigmates qu’elle lui inflige. Une simple recherche sur Internet suffira pour vous donner toutes les informations que vous souhaitez. En revanche, je veux vous parler de sa générosité, de sa joie de vivre, de sa gentillesse… Lorsque je suis allée lui rendre visite en octobre 2012, elle m’a accueillie à bras ouverts, elle a voulu me faire cadeau de ses jouets préférés, sans savoir pourquoi j’étais là. Elle n’avait que trois ans à l’époque. « Tu es mon amie de Paris » me disait-elle. Elle crie « je t’aime » quand elle entend sa mère me parler au téléphone. Elle console sa mère « ne t’inquiète pas maman, j’irai mieux un jour, tu verras ». « Tu es belle ! » dit-elle à sa grande sœur. Elle me l’a dit à moi aussi. Elle, qui a si peu de raisons de se réjouir, voit un monde plein de beauté autour d’elle. Elle, qui est traitée de paria – lorsque sa mère l’a emmenée dans un cabinet d’ophtalmologie pour une irritation aux yeux causée par sa maladie, elles ont été mises à la porte avec des insultes par l’ophtalmologiste qui leur reprochait l’incorrection d’aller à son cabinet avec une maladie si sale et contagieuse – accueille tout le monde avec le sourire. Elle, qui a si peu à donner, elle donne tellement !

Ceux qui ont aidé Alexandra-Denisa
Aujourd’hui je veux remercier tous ceux qui ont vu plus loin que cette femme médecin qui les a mises à la porte. C’est affligeant de voir qu’il peut y avoir autant d’ignorance et de méchanceté même parmi des professionnels de la santé, des personnes ayant dédié tellement d’années de leur vie à l’étude d’une science qui doit être au service de la santé des êtres humains. Je me permettrai de citer juste un passage du serment d’Hippocrate : « Dans quelque maison que j’entre, j’y entrerai pour l’utilité des malades, me préservant de tout méfait volontaire et corrupteur… ». Le serment a dû changer dans la forme, mais dans l’essence je pense qu’il reste inchangé. Heureusement, pour la plupart des médecins, dont ceux qui font partie de notre paroisse et qui ont apporté leur soutien à Alexandra-Denisa, ce serment a encore un sens. Pour le spécialiste de Necker qui a accepté de se pencher sur le cas d’Alexandra-Denisa dès que nous aurons réuni les fonds nécessaires pour la faire venir en France se faire soigner – autant que faire se peut – ce serment a un sens. Il s’agissait sans doute, dans le cas de cette ophtalmologue, d’un de ces moments d’anesthésie de l’empathie et de la sensibilité dont nous avons chacun fait preuve à un moment de notre vie. Heureusement, les anesthésies ne sont pas permanentes – les spécialistes me contrediront peut-être. Et, lorsque l’effet de cette anesthésie se dissipe, nous ressentons la douleur, en l’occurrence la douleur de notre prochain. Vous avez été nombreux à ressentir cette douleur de la petite Alexandra-Denisa. Moins nombreux que les anesthésiés, hélas, mais ne perdons jamais espoir. Beaucoup de membres de notre paroisse ont contribué financièrement pour alléger les coûts engendrés par cette maladie – consultations, déplacements, séjours dans des hôpitaux de plusieurs villes, pansements, compléments alimentaires, car elle ne peut pas consommer de la nourriture solide etc. D’autres se sont impliqués par des actions – mise en place d’un dossier, envoi de messages sur le forum etc. Je vous en remercie de tout cœur ! J’aimerai pouvoir transmettre à chacun de ceux qui ont contribué, la chaleur qu’elle m’a transmise lorsque je suis allée la voir. Sachant que la seule contribution financière des membres de la paroisse ne suffirait pas, j’ai commencé à chercher des organismes et des sociétés susceptibles de pouvoir l’aider d’une manière ou d’une autre : la faire venir en France pour voir un spécialiste puisqu’en Roumanie il n’y en a pas, s’agissant d’une maladie peu connue ; prendre en charge une partie des traitements, des pansements ou des compléments alimentaires. J’ai frappé à plusieurs portes sans réponse. Mais un jour, quelqu’un a ouvert. Ce quelqu’un est Madame Aurélie BECQUART du département marketing de la société MÖLNLYCKE HEALTH CARE. Je vous en remercie ! La mère d’Alexandra-Denisa a fondu en larmes quand je lui ai donné la bonne nouvelle. Les pansements que vous m’avez envoyés pour Alexandra-Denisa sont bien arrivés chez moi et, à l’aide d’un autre membre de notre paroisse, qui s’est impliqué activement dans cette action humanitaire, les cartons ont été acheminés vers la Roumanie. Je remercie également la société de transport Atlassib, qui a accepté d’emmener gratuitement les colis jusqu’à un point relais de colis de la ville de Iasi en Roumanie où habite la famille BIBIRIG. Le chauffeur d’Atlassib est même allé au-delà de l’engagement initial et, malgré la fatigue du voyage entre la France et la Roumanie, il a livré les paquets à la maison. Un grand merci à tous ceux qui n’ont pas pu contribuer matériellement, mais qui portent Alexandra-Denisa dans leurs prières. Continuons à prier pour elle et croyions qu’il est possible qu’elle aille bien un jour. Elle y croit !

Mara URCAN BOUREL